vendredi 23 mars 2007

MA mer: une tragédie grecque

À peu près tout le monde connaît Mare Nostrum. Un genre de "Civilisation light", avec des règles simples et une durée de jeu acceptable. Je ne vais pas m'étendre sur le sujet, mais en gros, chaque joueur contrôle l'une des 5 civilisations méditerranéennes de l'antiquité (plus les Atlantes avec l'expansion mythologique) et doit mener son peuple à la victoire par la construction des pyramides ou de 3 héros supplémentaires, le tout agrémenté d'un peu de guerroyage. Le jeu utilise de jolies unités en bois, rassurant les joueurs "d'euros". Pourtant, malgré son emballage et la très inefficace phase de commerce (Inefficace, pas inutile. Sa mécanique est faible, inutilement longue, mais un ou deux bons échanges sont essentiels à la victoire), ce jeu est un wargame, qui récompense pas mal plus l'offensive que la défensive et la guerre sur la simple expansion économique. Heureusement, ce serait ennuyant sinon!

C'est un très bon jeu d'initiation aux wargames et bien équilibré... sauf pour les grecs. Je suis incapable de faire gagner les Grecs et je ne les ai jamais vu gagner sauf dans des circonstances exceptionnelles et généralement avec des joueurs débutants provenant de groupes ultra-pacifistes. C'est certain que l'extension mythologique, avec le Centaure, a donné un bon coup de barre à la capacité de projection de force du Grec. Mais le problème reste le même. Son économie est trop divisée pour lui permettre d'aisément construire des héros. Il peut facilement écraser Rome, mais ça revient à donner la victoire à un Cartagénois le moindrement compétent. J'ai également essayé la tactique de la "balance des pouvoirs" (ancien joueur de diplomatie, je n'y peux rien) mais la structure économique du jeu fait en sorte que les sacrifices ne rapportent pas. Les autres nations se réjouissent de voir deux voisins en venir aux coups, mais ça reste toujours plus payant (sauf pour le Grec et le Romain) à Mare Nostrum d'être peinard dans son coin en attendant que les deux se soient affaiblis pour frapper. C'est très rare que l'on voit des alliances et encore plus rare avec le Grec, dont la puissance maritime rends imprévisible et inquiétant. De la non-agression, mais pas grand chose d'autre. Un autre problème avec la tactique de la balance des pouvoirs, c'est que le jeu est très rapide et le temps de frapper un coup à deux adversaires, les deux autres ont pris tellement d'avance économiquement qu'ils sont au bord de la victoire et ont une armée qui peut encaisser les pertes pas mal plus efficacement que la Grèce ne le peut. La seule avenue que je vois encore, c'est possiblement de se concentrer sur les villes, mais à ce jeu, l'égypte est plus performante et les villes sont assez limitées en nombre (on utilise le placement de départ libre). Malgré la sécurité des villes sur îles grâce au blocus grec, il reste encore trop facile de frapper le grec avec Poséïdon ou bien Baal.

La seule illumination que j'ai eu, c'est justement le rapprochement avec Diplomatie. Sa puissance navale le met rapidement en contact avec toutes les nations. Le problème, c'est qu'il ne peut convoyer des unités alliées et que la durée très limitée du jeu ne lui laisse généralement pas le temps voulu pour calmer des voisins outré par une attaque et en faire des janissaires, généralement une tactique plus payante pour les deux qu'un éternel gaspillage de ressources pour reconquérir une province convertie. Ah... les joies du Lepanto! Mais plus sérieusement, ça pourrait être intéressant d'essayer une variante où les flottes adverses peuvent convoyer vos troupes vers des terres étrangères.

Il y a plusieurs avantages au niveau de l'équilibre. D'abord, il n'y aurait pas nécéssairement une guerre Greco-Romaine. Ils pourraient s'entendre pour aller frapper ailleurs où Rome ne le pourrait pas tout seul. Par exemple en Égypte ou bien à Babylone. Même chose pour Carthage, qui reçoit justement la critique d'être trop isolé. La Grèce serait probablement tout aussi intéressée à convoyer le Carthagénois vers Babylone ou Rome. Il est clair que l'idéal pour le Grec serait une guerre Rome-Carthage d'un côté et Babylone-Égypte de l'autre (avec intervention greque pour dynamiser les fermiers trop pacifiques). Ça me semble être une avenue possible de victoire grecque tout en ajoutant un peu de diplomatie au jeu. Évidemment, avec son blocus, le Grec resterait maître des mers, mais pourrait capitaliser dessus avec des offres de transport. Quand même plus excitant que le titre de "Grand Prêtre". Ça encouragerait aussi possiblement les nations opprimées par ce même grec s'il parvenait à prendre le dessus à se faire une petite flotte chacun et les combiner pour transporter leurs troupes un tour où le Grec aurait été imprudent avec son positionnement maritime. En tout cas, si quelqu'un essaie ça, je serais très curieux d'entendre parler des changements à la dynamique et à la balance du jeu.

3 commentaires:

elisabeth_pelletier a dit…

Toute tes théories sont ben belle Benoît... mais maintenant que l'on a découvert que les impôts comptent dans le compte des cartes pour les échanges... Ça fausse complètement la donne et l'économie trop diversifiée du Grec devient le lot de tous (à condition que le maître du commerce fasse des échances et que chacun fasse sont boulot !)

J'ai hâte de rejouer... Merci à Mélanie pour cette découverte tout de même ! Une petite règle inventé qui changeait tout ! ah la la !

Benoit Lescarbeau a dit…

Je sais pas, quand je jouais l'égyptien, je peux pas dire que ça m'a vraiment affecté. Je n'ai jamais mis d'argent dans la phase d'échanges. C'est sûr que si le grec en mets, ça devrait attirer l'égyptien, mais est-ce que ça va donner un si grand coup de barre que ça? Il va pouvoir aller se chercher une, peut-être deux s'il est chanceux, ressources qu'il ne produit pas. Puis généralement, le Carthagénois le voit vite quand c'est le temps de stopper les échanges question de nuire à tout le monde sauf à lui...

elisabeth_pelletier a dit…

À vrai dire, s'il y a de l'impôt dans les échanges, je trouves que ça mets tous les producteurs de ressources un peu dans l'embaras. Ils risquent fort de se ramasser au moins un impôt ce qui leur fera (peut-être) perdre des ressources qu'ils ne pourront pas mettre en trio.