dimanche 26 octobre 2008

Style de DM

Question de faire changement de mes podcasts de wargame, je suis allé sur l’exhaustif répertoire rpgpodcasts me télécharger quelques épisodes aux sujets intéressants. Quelques discussions m’ont fait réaliser que je me fourvoie peut-être dans l’organisation de mes parties de rpg sur table.

Comme je l’ai déjà dit, pour moi, ce type de passe-temps est essentiellement une excuse pour faire une activité sociale pas trop dispendieuse, constructive, créative et stimulante. Je rassemble une couple de personnes courageuses et intéressées, on prépare un petit souper, on prends un peu de vin puis on brasse quelques dés.

Il y a un écrivain africain qui disait : « le tigre ne proclame pas sa tigritude, il bondit sur sa proie et la dévore ». J’aime cette façon de penser, je crois aux actes, pas aux paroles. J’ai toujours proposé mes parties de façon assez inclusives. Du genre : voilà une petite intro d’une partie que je veux faire, si ça t’intéresse, voilà l’adresse. J’ai longtemps pensé que les obstacles principaux à la participation étaient l’apathie et la terreur de passer une soirée avec des gens qu’on connaît moins.

En y repensant, le problème (dans l’exécution en tout cas), c’est peut-être plus que mon style de DM ne colle pas toujours à ce que les joueurs rassemblés voudraient. On se met alors à se nuire les uns les autres. J’ai longtemps pensé qu’un bon DM était capable de faire plaisir à tout le monde. Un peu de drame par ci, une baston par là, un peu de romance puis un peu d’humour noir. Le problème, c’est que très souvent, surtout parmi les vétérans, il y a toujours au moins un participant qui y voit le moyen de vivre ses fantasmes de puissance personnelle. La réponse à toute situation est généralement une série de meurtres gratuits et toute conséquence mène invariablement à la dissolution complète de la partie. Ou encore le joueur qui se croit dans une partie d’échec et qui préfère élaborer des stratégies complexes, avec le moins possible d’interactions avec l’univers, pour « gagner » la partie. Je n’ai rien contre ces styles de jeu, ils existent et ne disparaîtront pas, mais ce n’est pas ce qui m’intéresse. Ce n’est donc pas vers ces types de défi que j’oriente mes parties et je devrais donc essayer d’avoir un groupe de joueurs plus homogène pour, comme je le disais, ne pas se piler sur les pieds.

Peut-être qu’en élaborant un peu plus sur le style de jeu que j’essaie de faire, je risque d’avantage de me retrouver dans des groupes partageant les mêmes intérêts. Un peu comme ces fameux archétypes de joueurs que M Robin Laws et même la 4e édition mentionnent. Ça ne peut pas nuire d’y penser un peu, surtout si je veux éventuellement me risquer à faire une partie dans une convention. Faut pas décevoir ces braves qui vont jusqu’à payer pour avoir leur dose de rpgs originaux!

Comme DM, je crois avoir une nature de conteur. Oui, je sais, c’est pas super original pour un DM. J’aime créer un univers cohérent, mystérieux, aux secrets à découvrir. Par contre, je n’aime pas être un narrateur. C’est à dire quelqu’un qui impose l’histoire au travers laquelle les joueurs vont évoluer de A à Z, en ligne droite, « réussissant » ou « échouant » la mission. Ce que j’aime faire quand j’écris mes parties, c’est de poser l’univers et un ou plusieurs crochets / crises / éléments déclencheurs qui poussent les joueurs à agir. Oui, j’ai une histoire approximative dans ma tête. Essentiellement les motivations des protagonistes principaux. Mais mon plaisir comme DM vient lorsque le déroulement de cette histoire change complètement de direction. J’aime les joueurs qui participent et veulent emmener l’histoire dans une direction qui les intéresse d’avantage, sur des sujets qu’ils apprécient. Ça me force à devoir improviser des situations ou des personnages inattendus et c’est ça que j’aime. L’avantage de ce style, c’est la liberté et les surprises qui en découlent. Le désavantage, c’est qu’il n’y a pas toujours le chemin bien clair, la finalité et le sentiment d’accomplissement venant d’une partie très dirigée.

En plus de cet élément participatif qui me fait passer du statut de simple machine narrative à conteur, j’aime beaucoup les dilemmes moraux et les choix difficiles. Les situations où il n’y a pas de « bonne réponse » et dont le résultat ne fait donc qu’orienter l’histoire dans une nouvelle direction, au choix des joueurs. Ça c’est plus difficile car beaucoup de joueurs détestent la responsabilisation qui en découle. Je n’aime pas les histoires en noir et blanc. C’est cliché, ça m’ennuie et je dois pas être le seul. Faut des conséquences troublantes! Encore une fois, en toute honnêteté, il n’y a pas que des avantages. L’ambition est d’en faire un loisir parfois moins léger, qui peut, possiblement, émouvoir comme une bonne histoire. C’est le but ultime d’un conteur et de plusieurs jeux indy.

Après cet élément principal d’interaction dans l’histoire, ce que j’aime beaucoup faire, c’est de l’exploration. Quand je fais une partie, c’est en grande partie parce que je veux connaître un peu la sensation d’exister dans un univers en particulier. Je suis un DM et un joueur immersif. Non, je vais pas me costumer, mais j’aime que les joueurs m’aident à découvrir un monde. Que ce soit la vie secrète des chats domestiques aux paysans médiévaux jusqu’à la routine journalière sur un vaisseau interplanétaire, je suis curieux de savoir ce qui en ressort. Je suis convaincu qu’il y a des éléments intéressants et poignants à y puiser et oui, je veux y jeter un coup d’œil. Même le plus omnipotent des demi-dieux a une vie sociale et oui, je m’intéresse à ce qu’il fait pour s’occuper le dimanche.

Par contre, avant de penser que j’ai toute les qualités du super DM qui crache sur la plèbe et fait des larps scandinaves sur les cancéreux qui se roulent dans la farine, je dois admettre avoir quand même peu d’intérêt pour le « jeu d’acteur ». Oui, j’aime que les personnages aient de la personnalité, mais il ne faut pas que ça nuise à l’histoire. Ok, tu peux avoir une jolie robe pour aller au bal. Pas obligé de nous la décrire pendant 15 minutes avec le souvenir lié à ta mère que ça éveille en toi. Si ça ne fait pas avancer l’histoire, essaie de garder ça court ou de carrément nous envoyer ça par email ensuite et je verrai si je peux pas intégrer ça un moment donné. Ce type de joueur a parfois la fâcheuse tendance à vouloir s’accaparer le podium et je dois admettre être un peu socialiste dans le temps de jeu accordé à chacun. Je veux que tout le monde participe, pas un seul qui traîne les autres par le fond de culotte ou les enterre s’ils osent faire quelque chose.

Plus terre à terre, comme tout vrai DM, j’accepte l’idée qu’un personnage puisse mourir. Surtout si la partie est dans un univers brutal. Je ne suis pas un DM tueur, je ne le fais pas à la légère et ça reste rare. En plus de 15 ans, les cadavres fictifs doivent se conter sur deux mains. Par contre, c’est essentiel pour que la partie reste crédible. Trop de joueurs assument que le DM n’osera jamais les tuer et se mettent alors à prendre des risques vraiment exagérés, un peu comme dans une partie de chicken. Ben de mon point de vue, ta mort dramatique fera un très bel élément narratif pour les autres joueurs plus raisonnables, alors si tu crois percevoir des indices que ça risque de mal tourner bientôt, penses-y à deux fois. Personne n’est invulnérable.

Je crois que ça décrit le cœur de mes parties. Ça varie d’une session à l’autre, mais les thèmes ont des tendances lourdes vers le sombre et le troublant. J’essaie quand même de changer de temps en temps. Par exemple une partie plus héroïque fantastique, une partie très pulp, une partie plus onirique ou (pas encore fait mais j’aimerais beaucoup) une très jovialiste partie de Star Trek! Le thème d’une partie est facile à transmettre dans mes intros, mais le style de jeu l’est beaucoup moins. Alors en clair, les storytellers devraient bien s’amuser, de même que les spécialistes et les botteurs de culs (rien contre une bonne baston qui vient supporter l’ambiance). Les acteurs, les tacticiens et les power gamers risque de moins s’amuser. Par contre, j’invite ces derniers à se joindre à moi pour une bonne partie de wargame avec miniatures!

2 commentaires:

Francois Grothe a dit…

J'aime bien cette façon de penser, déjà que le MJ se farçit toute la création du scénario et doit gérer le jeu, le style de jeu devrait le sien et non celui des joueurs (même si ce n'est pas mutuellement incompatible du tout.)

Benoit Lescarbeau a dit…

On verra ce que ça donne. Je ne vais sûrement pas "screener", mais au moins, les gens sauront à quoi s'attendre et vont idéalement plus participer pour le style que juste pour, en gros, avoir une partie.